Sephora Saada : « Ma spécialité ? Le cheesecake salé »

A 26 ans, elle a ouvert sa première pâtisserie She’s Cake, consacrée au fameux gâteau new-yorkais. Avec une deuxième boutique à la clé dans le Marais ouverte il y a un an-et-demi, et avec autorité mais une certaine discrétion, Sephora Saada a depuis conquis la capitale avec ses revisites sucrées et salées du cheesecake. Des créations salées qu’elle est la première à avoir créé et qu’elle veut maintenant développer dans ses deux boutiques.

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FOCUS SUR LA CHEFFE ET SON CONCEPT

Par où avez-vous commencé dans le métier ?
J’ai d’abord fait l’Ecole de Boulangerie et de Pâtisserie de Paris (EBP), puis j’ai travaillé avec mon frère avant d’ouvrir ma pâtisserie à 26 ans. Entre-temps, j’ai travaillé pendant cinq ans dans plusieurs restaurants, des pâtisseries de quartiers où j’ai pu apprendre les bases, et dans une pâtisserie franco-japonaise.
J’avais envie de faire un métier créatif artistique. Dans la famille, on est beaucoup à être dans le milieu alimentaire.

Pourquoi le cheesecake ?
C’était un défi de retravailler la recette. C’est un gâteau que j’aime beaucoup mais le défi était de le revisiter à la version française, apporter un peu de légèreté, enlever le côté « trop gras ». Même visuellement, je voulais qu’il soit moins grossier qu’un cheesecake new-yorkais, mais je voulais garder son goût. J’affectionne particulièrement la recette de base du cheesecake des pays de l’Est.

Mon défi était de le revisiter, de lui apporter un peu de légèreté.

N’était-ce pas aussi un risque d’ouvrir une boutique mono-produit ?
C’est aussi une idée que j’avais parce qu’à Paris, il y avait la Maison du Chocolat, celle du caviar, mais pas la Maison du cheesecake. Or dans tous les voyages que je faisais à l’étranger, dans tous les restaurants, il y avait un cheesecake à la carte. A Paris, à part Berko, rien. Un risque mais aussi un challenge… les gens adorent le cheesecake.

Vous avez été élu « Meilleur cheesecake de Paris » (sucré), mais vous faîtes aussi du salé ?
Mais moi la spécialité ici, c’est le cheesecake salé. Je le revisite, j’adore la cuisine autant que la pâtisserie. Je peux associer différentes saveurs et créer. J’ai des formules pour le midi que l’on accompagne de légumes grillés par exemple. L’hiver, j’ai des petites soupes, puis là on va passer au gaspacho, et l’été à des salades fraîches.
Les gens ont une vision logique de la pâtisserie, ils adorent le sucré. Mais je le répète, moi ma spécialité, c’est le cheesecake salé. Je fais des parfums non communs pour le grand public.

Le cheesecake salé justement, du jamais-vu jusqu’alors ?
C’est un défi aussi car le cheesecake salé, ça n’existait vraiment pas. Il fallait créer une recette avec les biscuits, la crème, des mélanges. J’essaye d’aller des saveurs pour surprendre les gens :

  • Camembert/épices indiennes/raisins secs
  • Chèvre/pesto/coriandre/noisettes
  • Comté/cumin/amandes effilées
  • Chèvre/miel/romarin
  • Saumon/wasabi/sésame
  • Roquefort/poire/noix

Il y a une belle déclinaison à la carte.

Un défi aussi car le cheesecake salé n’existait pas.

Tout ça donne envie, mais les gens connaissent ?
Les gens adorent le salé mais la boutique fait tellement pâtisserie que les gens ne comprennent pas tout de suite. Ca pourrait mieux marcher. C’est ma passion donc ça ne marche pas comme je voudrais.

Le Cheesecake salé : camembert, épices indiennes et amandes | Crédit : She’s Cake.

Quelle importance accordez-vous au choix des ingrédients ?
J’ai des fournisseurs précis pour tous les produits. J’aime bien travailler avec les petits producteurs, comme pour le praliné ou la pâte de pistache.
C’est important que le produit soit bon, que le produit ait du goût. J’utilise du chocolat noir 75 % de cacao de Tanzanie par exemple. Le fait que tout soit fait maison pour moi est hyper important.

Vous avez une petite équipe… est-ce que ça fonctionne bien quand même ?
Nous sommes deux dans la pâtisserie du Marais avec moi. Ils sont quatre dans celle du 12e avec le labo. Ça fonctionne bien même s’il y a eu une légère baisse ces six derniers mois, comme partout je pense. Le week-end fonctionne très bien. La seule chose qui peut me frustrer, c’est que ça manque de vie le midi.

Comment décririez-vous vos boutiques ?
C’est très personnel, il y a un coté minutieux, un peu bijouterie. J’adore travailler la feuille d’or, d’argent, les fruits, la couleur. Même en vitrine, les gâteaux sont assemblés selon les couleurs. Pour moi c’est important le coté très carré, précis, précieux. Le bon est ma première préoccupation… mais le visuel l’est aussi. En sucré ou en salé, c’est ce que voient les gens en premier.

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INSPIRATIONS ET CRÉATIONS

Et vos inspirations, vous les trouvez où ?
Quand je fais un petit voyage. Là j’ai été cinq jours à New York et quand je suis revenu j’ai réécrit la nouvelle carte. J’ai toujours besoin d’être un peu en recul pour avoir de nouvelles idées. Quand je suis trop dedans, ça ne vient pas. Cela peut aussi venir quand je visite des endroits dans Paris, dans les bouquins, etc.

Vous l’avez dit, vous revisitez le cheesecake traditionnel. Vous créez en permanence…
J’ai une carte printemps/été et une carte automne/hiver. J’ai quasiment toujours une nouveauté chaque semaine. Quand j’ai des idées, je le mets en « cheesecake du jour ». C’est ma partie préférée : créer des recettes, imaginer ce qui va ensemble. Et c’est pareil en salé.

Le ELLIE-WASABI (moutarde japonaise, ganache de chocolat blanc, framboises fraîches) | Crédit : She’s Cake.

Le cheesecake « best-seller » chez She’s Cake, c’est lequel ?
Le « Sheli-Rose » (rose, litchi, framboises fraîches, cubes de gelée à la rose). Il reste à la carte en permanence. Il fait partie des cinq-six cheesecakes qui y sont tout le temps. Par exemple, le « Chico » (caramel beurre salé) va disparaître l’été, et on va le remplacer par un caramel de lavande, pour un côté plus provençal, plus frais.
Les fruits, je ne les travaille qu’au printemps. Pour moi, les fraises doivent avoir du goût.

Ma partie préférée ? Créer des recettes, imaginer ce qui va ensemble. Et c’est pareil en salé.

Et le votre ?
Le « Keiko » : crème de marrons, fleur d’oranger. Ce sont mes goûts personnels bien sûr.

De qui êtes-vous le plus proche dans le métier ?
Je suis très proche de mon ancien chef. Sinon, personne en particulier. Je suis peut-être sauvage (rires). Franchement je n’ai pas de relations spéciales avec des pâtissiers même si j’adore aller goûter ce que font les autres.

Votre frère*, c’est une aide pour vous ?
Il m’a appris pas mal de choses, et puis au niveau de la cuisine, il est assez connu. Aujourd’hui, non. Il a sa vie, j’ai la mienne. J’ai mon concept.

*Yoni Saada a participé à la saison 4 de l’émission Top Chef et est à la tête aujourd’hui des restaurants Miniatures et Bagnard, consacré au Pan Bagnat.

Vous avez deux pâtisseries aujourd’hui. Une troisième est-elle à l’ordre du jour?
Pour l’instant je suis bien comme ça, je veux continuer à développer. Cela fonctionne bien mais je ne suis pas satisfaite et ça ne marche pas comme je veux.
Un jour, j’aimerais avoir un petit restaurant autour du cheesecake, mais vraiment un petit. Plus le concept évolue, plus je m’aperçois que j’aime la cuisine. Si je pouvais allier les deux…
Pour l’instant c’est beaucoup plus sucré que salé, et j’ai cet objectif que celui ci devienne un restaurant. Je sais qu’il y a du potentiel.

Le MATCHA (thé vert Matcha, coeur de pâte d’amandes et haricots rouges) | (Crédit She’s Cake).

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UN JOUR / UNE ADRESSE

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Cheesecake préféré
C’est celui de la pâtisserie des pays de l’Est chez Florence Kahn, rue des rosiers dans le Marais. Après en cheesecake, à Paris, franchement c’est rare, il n’y en a pas des masses.
Il y en a quand même que j’adore, ce sont ceux des pâtisseries japonaises. Par exemple ceux de chez Aki. Il y a un coté spongieux, pas trop sucré, pas gras. Mais ce ne sont pas des vrais.

Une pâtisserie (en dehors du cheesecake)
Mon gâteau préféré c’est le fraisier japonais (ou Matsuri) : un genre de sponge cake avec de la chantilly et des fraises. La fraise est mon péché mignon.
J’adore la pâtisserie mais pas trop sentir le sucre. Le Paris-Brest pour moi est un peu trop sucré, trop gras. Le sucre me dérange trop vite. Si je fais un fondant au chocolat, je travaille sur le cacao et l’amertume. Pas de sucre.
Sinon j’aime beaucoup la Carrot cake. Le flan est aussi un de mes gâteaux préférés. Tout ce qui est à base de fraise ou de chocolat (85 % cacao) ou encore la tarte aux pommes en traditionnel.

Une table
Season. Ce n’est pas un « gastro », mais ce sont les saveurs que j’aime bien, les légumes, etc. J’aime beaucoup la cuisine asiatique sinon (elle est passée par la Chine et le Japon notamment).

Une autre passion
J’adore la musique (je faisais de la guitare, du piano et de la batterie). J’en fais un peu moins à cause des boutiques.
Sinon, je fais de la capoeira. Avec la capoeira, je suis hyper sérieuse, c’est un sport qui fait du bien. Pour le travail, ça m’aère la tête, il y a une énergie.
Et les voyages aussi. Depuis septembre, j’ai le temps de me faire pas mal de petits week-ends. Même au niveau culinaire, je continue à découvrir. Comme à Berlin où j’ai découvert « Princesse cheesecake », une boutique dans le même concept que le mien. Voir des vaisselles, le design… je ne vais jamais copier mais ça va m’apporter une source d’inspiration différente. M’apporter des idées.

Les cheesecakes traditionnels entre 4,30 € et 5,20 €.
Formules à 12,80 € (entrée – plat ou plat – dessert / le plat étant un cheesecake salé) ou à 14,80 € (velouté fait maison – cheesecake salé avec légume ou salade – verrine de cheesecake).

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 She’s Cake, 37 Rue du Roi de Sicile, Paris IVe / 20 avenue Ledru-Rollin, Paris XIIe.

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